Le ruisseau sombre, brun comme selle de cheval,
Charroyant dans la pente ses roches rugissantes,
Et sa toison d’écume en ses creux et ses combes
Vers le tréfonds du lac dévale en sa maison.
La coiffe fauve d’une mousse vol-au-vent
Tourne et se brise par dessus la boue
D’un siphon d’encre noire caché tout au fond,
Elle broie l’inespoir et le broyant le noie.
Saturés de rosée, au prisme des rosées,
Au secret des hauteurs que traverse son cours
Bruyère en maigres touffes, bouquets de fougères,
Colliers de frênes au surplomb du ruisseau.
Qu’adviendrait-il du monde, une fois dévêtu
De sa nature et de ses eaux ? Laisse-les nous,
Ô laisse-nous et la nature et l’eau ;
Vivent l’herbe sauvage et la nature intacte.
(Gerard Manley Hopkins, Poèmes)